Thérapie cellulaire en France et I-Stem : 10 ans à peine pour passer de la recherche aux essais cliniques

C’est à l’occasion des 10 ans du laboratoire de recherche I-Stem, qu’une conférence de presse a réunie des scientifiques français de renommée internationale à Paris le 27 octobre dernier pour faire le bilan de 10 années de travaux pionniers menés sur les cellules souches et des avancées majeures obtenues en termes de thérapie cellulaire.

Créé en 2005 par l’AFM-Téléthon et l’INSERM, I-Stem est également membre depuis 2012 de l’Institut des Biothérapies des Maladies Rares (IDB) de l’AFM-Téléthon, force de frappe unique et pôle de référence mondial en recherche translationnelle et innovation biomédicale. Avec ses 70 chercheurs, Istem est aujourd’hui le plus grand laboratoire français dédié à la recherche sur les cellules souches embryonnaires comme celles induites à la pluripotence. Aujourd’hui, les équipes d’Istem préparent des essais cliniques pour traiter des pathologies de la peau et de la vision dès 2017, et une maladie neurodégénérative (maladies de Huntington) dès 2019. Il est dirigé par le Dr Marc Peschanski qui animait cette conférence.
Ce dernier a d’abord rappelé que, malgré un démarrage tardif en 2005, la France a pu rattraper son retard dans le domaine de la recherche sur les cellules souches à visée thérapeutique. Il a également évoqué la création en 2012 du consortium INGESTEM (Infrastructure Nationale d’Ingénierie des Cellules Souches Pluripotentes dont l’objectif est de générer des iPSC et des cellules différentiées pour les applications cliniques. Le Pr P. Menasché (Chirurgie cardiaque, Hôpital Européen Georges Pompidou) a ensuite fait le point sur les applications actuellement testées en cardiologie. Le premier essai français utilisant des cellules souches embryonnaires a effectivement démarré en 2014. Il a bénéficié des premiers travaux initiés à I-Stem en 2007 et est soutenu par l’AFM-Téléthon. Il concerne l’insuffisance cardiaque sévère et a inclus une première patiente en octobre 2014. Pour cet essai, des cellules progénitrices cardiaques sont dérivées de cellules souches embryonnaires humaines. Elles sont ensuite « encapsulées » dans un gel de fibrine, une protéine filamenteuse. Ce “pansement” est greffé sur l’épicarde (la couche externe du coeur), au niveau de la zone à traiter. Le Pr J.A. Sahel, directeur de l’Institut de la Vision (Inserm, CNRS, Université Paris VI), a ensuite présenté un projet d’étude clinique de phase I de thérapie cellulaire dans les rétinopathies pigmentaires développé en collaboration avec I-Stem. Ce projet vise à évaluer la tolérance d’une greffe de cellules de l’épithélium pigmentaire rétinien dérivées de cellules souches embryonnaires humaines, disposées sur un support biologique (membrane amniotique) chez ces patients. Enfin, le Pr A. Benaceur-Griscelli, directrice de la plateforme cellules souches de l’hôpital Paul Brousse (Villejuif), a aussi évoqué les perspectives ouvertes par la découverte révolutionnaire de l’équipe de S. Yamanaka de l’induction de la pluripotence par la technique de reprogrammation cellulaire. Les cellules iPS (cellules souches pluripotentes induites) permettent d’élargir les champs d’application de modélisation de nombreuses pathologies humaines pour reproduire les altérations fonctionnelles des tissus lésés et développer une médecine de précision et thérapies ciblées. Un projet d’Haplobanque nationale (cellules iPSC générées à partir de donneurs sains HLA haplotypés) vise à produire une source illimitée de cellules souches qui sera mise à disposition pour la production de médicaments de thérapies innovantes compatibles avec la majorité de la population.
Pour conclure après un débat très riche, M. Peschanski est revenu sur l’annonce faite début octobre du partenariat entre l’AFM-Téléthon et la banque publique d’investissement Bpifrance pour la création d’un site de fabrication industrielle des médicaments de thérapies génique et cellulaire en France et ainsi créer une nouvelle filière économique. En effet, les capacités de production actuelles sont largement insuffisantes face à la multiplication des essais cliniques. L’AFM-Téléthon, fidèle à son ambition de guérir, a donc décidé d’investir en ce sens, au bénéfice des malades.